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Sur la banquise, rien ne sert de courir, il faut dormir à point (fermé). Photo de Isaac Demeester sur Unsplash
IA Education nationale

IA et Education nationale : le lièvre et la tortue ?

Rémi
Rémi |

C’est bien connu, un lièvre fanfaron ne fera jamais le poids face à une tortue persévérante. Esope et Jean de la Fontaine l’ont bien écrit.

Et si la morale de cette fable éclairait la course de l’Éducation nationale face à l’IA ?

Voyez plutôt :

  • D’un côté, une technologie qui galope avec ChatGPT, Copilot, Gemini… des IA génératives utilisées au quotidien par des millions d’élèves, de professeurs, de personnels. Une course effrénée.

  • De l’autre, une institution structurée, précautionneuse, parfois accusée d’immobilisme, mais qui vient de publier un cadre de 22 pages d’usage de l’IA en éducation.

Un texte qui ne fait pas la course avec les innovations, mais tente de redessiner le terrain de jeu éducatif, à hauteur d’école, de collège et de lycée.

Que faut-il en retenir ?

Un cadre français prudent

Le cadre de l’Éducation nationale pose des principes de bon sens :

  • Utiliser l’IA dans le respect du cadre légal sur la protection des données à caractère personnel (RGPD) en ne saisissant que des données publiques.
  • Sensibiliser les élèves selon les niveaux scolaires, avec un usage encadré seulement à partir de la 4e
  • Avoir une vigilance critique accrue (pas d’usage aveugle, pas de substitution à l’effort intellectuel)
  • Encourager à l’ exigence de plus-value pédagogique et à la sobriété numérique

En résumé : une posture de prudence qui vise à protéger avant d’expérimenter.

Mais dans un monde éducatif où les usages se diffusent entre collègues ou entre élèves de façon très rapide et plus ou moins assumée (rappelez-vous, la love story shakespearienne des élèves et l’IA ou encore le détecteur de mensonge…), et en l’absence d’un véritable cadre réglementaire contraignant pour le moment, on peut se demander quels effets réels auront ces recommandations…

Pour l’impulsion, on peut parier sur un autre coureur : l’OCDE.

Un cadre international audacieux

OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) : organisation internationale qui œuvre pour des politiques visant à améliorer le bien-être économique et social de ses pays membres.

Avec la Commission européenne, l’OCDE a publié en mai 2025 un AI Literacy Framework, destiné à l’enseignement primaire et secondaire, et tourné vers les compétences.

Contrairement à ce que propose l’Education nationale, il ne s’agit pas d’un cadre réglementaire mais d’un cadre d’apprentissage.

L’objectif ? Que chaque élève et enseignant devienne capable de comprendre, questionner, utiliser et créer avec l’IA, de manière critique, créative et responsable, et ce, dès aujourd’hui.

Au programme :

  • Comprendre comment l’IA fonctionne (algorithmes, données, biais, limites)
  • Utiliser l’IA pour créer, résoudre, collaborer
  • Gérer l’IA dans son quotidien (déléguer, évaluer, ajuster)
  • Concevoir l’IA, comprendre ses choix de design et leur impact

Le tout, articulé autour de compétences durables, transversales, et scénarisé dès le primaire.

En résumé : l’IA n’y est pas seulement un outil. C’est un objet d’enseignement citoyen, à croiser avec les enjeux d’éthique, d’environnement, de droits humains.

Conclusion

🐇 Faut-il aller plus vite ?

Pas forcément. Remettons les choses dans leur contexte : une institution publique n’est pas une start-up et l’Éducation nationale n’a pas vocation à courir après les outils. Elle a le devoir d’aller lentement, de peser les risques, d’agir pour tous.

Mais dans un contexte où les IA bousculent les devoirs, les évaluations, les apprentissages, les repères pédagogiques, peut-elle se contenter de recommandations d’usages et de restrictions ? Aller trop lentement, c’est parfois prendre le risque de se laisser dépasser.

Le cadre est posé : « L’usage de l’IA ne doit porter atteinte ni à la valeur fondamentale de la relation humaine, ni aux apprentissages des élèves. »

À nous de lui donner corps, de réfléchir aux bons usages, aux limites pédagogiques, aux nouvelles formes de triche et d’apprentissage.

Parce que pendant que le lièvre caracole, la tortue ne peut pas se contenter de regarder les panneaux de signalisation.

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