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Le pouvoir du 3 et ce qu’on en retient pour la suite

Rédigé par Rémi | 7 juil. 2025 08:01:04

Beaucoup ont tenté de percer son secret, peu y sont parvenus : la règle de 3. Attention, pas la règle de 3 mathématiques, la règle de 3 narrative.

Voyez par vous-même :

  • Veni, Vidi, __.
  • Liberté, Égalité, __.
  • Le Bon, la Brute et le __.

Cette facilité de mémorisation est déconcertante. Pourquoi ? D’abord, parce que nous, les humains, adorons les combinaisons.

Déjà dans la Grèce antique, Aristote mettait au point sa fameuse technique démonstrative, le syllogisme.

Démonstration : « Tous les hommes sont mortels ; or Socrate est un homme ; donc Socrate est mortel. »

Imparable.

Ensuite, 3 est le plus petit nombre d'éléments nécessaires pour créer un schéma. Reliez deux points, vous avez une ligne. Reliez-en trois, vous obtenez une forme.

C’est donc naturellement que nous avons retenu ce chiffre pour notre bilan.

Parce que depuis janvier 2025, 40 enseignants du secondaire de l’académie de Lyon testent notre assistant IA pour la correction des copies et la remédiation pédagogique.

Voici ce qu’on a retenu pour ce dernier numéro de l’année :

  • 3 idées reçues
  • 3 découvertes
  • 3 défis

🧠 3 idées reçues

1. L’IA, c’est un truc de jeunes profs

Absolutely not ! À notre grande surprise, ce sont les enseignants expérimentés en milieu ou fin de carrière qui représentent près de deux tiers des effectifs et qui ont plongé les premiers dans l’expérimentation.

Moins impressionnés par la technologie, plus enclins à poser des questions de fond, ils ont été une belle source d’inspiration pour le projet Ed.

2. L’IA va rendre les profs moins réflexifs

Au contraire, notre expérimentation a agi comme un catalyseur de réflexion :

  • « Pourquoi j’évalue de cette manière ? »
  • « Qu’est-ce que je corrige vraiment ? »
  • « C’est intéressant que l’IA fasse cette erreur, c’est peut-être que je n’ai pas été clair dans mes attentes… »
  • « Pourquoi je valorise cette réponse et pas une autre ? »

En testant les outils, les enseignants ont revisité leurs pratiques en confrontant leurs évaluations, leurs corrigés, leurs barèmes et leurs critères à l’IA. Loin de les rendre passifs, cette confrontation a été source d’apprentissages et de remise en question pour eux.

3. L’IA va uniformiser les évaluations

Pas vraiment. Ce qu’on observe, c’est que notre solution doit s’ajuster aux pratiques des enseignants pour répondre à leurs besoins.

Chacun paramètre donc l’outil selon sa discipline, son niveau d’exigence, ses grilles d’évaluation et ses objectifs pédagogiques. Résultat : il n’y a pas une mais mille manières d’évaluer avec Ed.

🔬 3 découvertes

1. Corriger, ce n’est pas évaluer

Ça peut paraître évident mais ce n’est pas toujours clair dans les usages. Chez Ed, on distingue deux choses :

  • La correction, qui consiste à annoter une copie avec des commentaires : tâche relativement consensuelle chez les enseignants
  • L’évaluation, qui consiste à estimer une valeur sur une échelle relative (points, grille de compétences) : tâche beaucoup plus subjective et complexe.

Cette distinction fondamentale nous a permis de concevoir de manière prudente notre outil, en concentrant les efforts et la valeur ajoutée sur la correction (tâche pour laquelle l’IA excelle) et en laissant plus de latitude aux profs sur la gestion de l’évaluation (tâche plus risquée), quitte, dans certains cas, à ne pas évaluer du tout.

2. Ce que les enseignants attendent le plus : la remédiation

La correction n’est qu’un point de départ. Ce que les enseignants attendent le plus, c’est l’étape d’après : un outil de remédiation capable d’accompagner chaque élève sur son chemin de progression.

Car s’il y a bien une pratique qui fait consensus pour réduire les écarts et soutenir tous les profils d’élèves, c’est celle-là : proposer des suites pédagogiques différenciées, pensées à partir des erreurs réelles.

C’est là que l’IA prend tout son sens. En combinant les données fines récoltées au moment de l’évaluation et la capacité à générer des exercices pédagogiques tenant compte de ces données, on obtient la possibilité de proposer aux élèves une remédiation personnalisée sans que l’enseignant doive y passer des heures.

Il ou elle peut ainsi se concentrer sur ce qui a le plus de sens : ajuster, ré-enseigner, observer et guider les élèves en classe.

3. L’IA écrit tout haut ce que l’on pense tout bas

L’IA met en lumière les zones grises de l’évaluation : les critères implicites, les choix tacites, les biais involontaires… Là où l’humain agit parfois par habitude ou sous le coup de l’émotion, l’IA pousse à expliciter.

Et ça change tout. Parce qu’en tant qu’outil, l’IA ne se fatigue pas et va « prendre le temps » d’expliciter chaque élément corrigé.

Mieux encore, en tant que « voix » neutre, elle pourrait réduire la charge émotionnelle que les élèves associent au rendu de l’évaluation.

🎯 3 défis pour la suite

1. Mesurer l’impact réel sur les apprentissages

La prochaine étape est claire : dépasser le ressenti pour vérifier la progression réelle des élèves. Cela implique de mettre en place des protocoles rigoureux (groupes témoins, analyse longitudinale, comparaisons), autant sur l’efficacité de la correction que sur la remédiation.

Un objectif pour le courant de l’année scolaire 2025-26 !

2. Clarifier la répartition des rôles

L’IA assiste, l’enseignant décide. Pas l’inverse.

L’enjeu : garantir que les profs restent maîtres à bord et ne mettent pas leurs corrections en pilote automatique ; et s’assurer que la vérification de la pré-correction  par IA ne prenne pas trop de temps en réfléchissant de manière approfondie à son appropriation.

3. Rassurer élèves et familles

Dernier défi, et non des moindres : faire de l’IA un objet de dialogue pédagogique.

L’expérimentation l’a montré : les enseignants craignent un désengagement de la part des élèves (et des familles) s’ils recourent à l’IA pour corriger leurs copies. C’est vrai, faire confiance à un outil nouveau demande du temps et comprendre la démarche est primordial pour que la relation prof-élève reste au beau fixe.

C’est pourquoi il nous tient à cœur d’expliquer notre projet et de contribuer aux débats sur l’éducation et l’IA (via cette newsletter notamment !).

Conclusion

Cette année, on n’aura pas chômé !

En attendant de vous retrouver à la rentrée, on a pensé que 3x3 idées pour expérimenter la règle de 3 cet été, ça pourrait vous amuser :

  1. (Re)lire les 3 mousquetaires d’Alexandre Dumas
  2. (Re)découvrir les 3 petits cochons de Disney (animation oscarisée s’il vous plaît !)
  3. Se prendre pour le génie d'Aladdin et exaucer 3 vœux
  4. (Re)voir le film Les 3 frères
  5. (Re)écouter 3 petites notes de musiques
  6. (Re)jouer à 3 p’tits chats
  7. Observer 3 étoiles filantes la nuit du 12 au 13 août
  8. Ecrire 3 cartes postales
  9. Partager cette newsletter à 3 amis 

Le compte à rebours est lancé : 3, 2, 1… déconnexion !

Crédits photo : TC Photography sur Unsplash